
10 000 enfants, parents, enseignant·e·s, animateur·rice·s, associations, structures médico-sociales et professionnel·le·s présent·e·s.
Un immense merci à vous tou·te·s d'avoir été là pour cette incroyable 11ème édition du Festival Babel Minots ! Vous avez été formidables, et c'est grâce à votre énergie, votre bonne humeur et votre curiosité que ces deux semaines de spectacles ont été un véritable succès.
L'édito du mois de Squaaly
Il est des fins de mois difficiles, des fins de mois compliquées, des fins de mois qui démarrent au 20 ou plutôt encore, des fins de mois qui s’enchaînent mois après mois, avec la régularité d’un métronome ou se chevauchent au grand galop, se répétant ad vitam æternam ; et il est cette fin de mois qui quoi qu’on en pense marquera l’histoire de notre ville, l’histoire de la nuit de notre ville, de la fête dans notre ville, de la vie de notre ville.
Avant-hier, lundi 31 octobre, le Dock des Suds menait sa dernière danse, tirait sa révérence et le rideau par la même occasion. Dès hier, 1er avril, mieux qu’un poison, les équipes se sont acharné à démonter toutes les installations qui l’ont fait vivre et briller, à le tuer si l’on doit être lapidaire. Cela prendra certainement plus d’un bon mois, mais au final, l’escalier magistral sera démonté ! Les lustres, démontés ! Les rampes d’accès sur l’extérieur, démontées ! Les câbles électriques, démontés ! Les scènes sur et autour desquelles lesquelles, le dieux de la fête et leurs apôtres se réunissaient, démontées ! Jusqu’aux toilettes où tout un chacun avait pris l’habitude de faire la queue, démontés, démontés et démontés. Ce n’est donc pas une fermeture provisoire, mais bel et bien un arrêt définitif, puisqu’Euroméditerranée, son proprio a choisi de récupérer son bien et d’en modifier la destination. Démonté, tout le Dock démonté et chaque élément vendu, pour tenter d’empailler le meilleur matelas pour Latinissimo, la structure qui porte la Fiesta et Babel Music XP, afin de parer aux futures coûts induits pas la disparition du Dock et les baisses des subsides publiques et autres aides privées qui se généralisent. Des années d’investissements, des années de sueurs de travail, mais aussi de joie et de danse, d’émotions balayées sans aucun espoir de voir à ce jour, un lieu prendre le relais de celui qui a abrité le rêve devenu réalité de nos nuits plus belles que nos jours ; quand Marseille perdait chaque année des habitants. Des rêves qui ont participé à signifier la singularité de notre ville, qui ont su imprimer la trame du vivre ensemble quand les deniers publics offraient la possibilité aux organisateurs d’offrir des valises d’invitations faisant de ce lieux un mythe à l’instar du stade, un chaudron de la diversité heureuse, de la fête, de la fiesta plus précisément si l’on doit appeler un pangolin, un pangolin et un chat, un chat.
Boomer né au début des années 60, j’ai eu le bonheur de vivre toute l’aventure du dock et ce, des deux côtés de la barrière qu’on franchit avec un bracelet magique, un pass d’un soir. Ces nuits de fin de semaines à plus de 1000 personnes, 2000, 5000, ces nuits aux programmes longs comme un jour sans fin, comme une nuit qui sait attendre le retour du soleil pour retrouver son lit, sont désormais ici finies, et les gesticulations de nos politiques n’y ont rien changé, laissant sur le bas-côté du Dock des centaines d’intermittents des métiers du spectacles vivants et une poignée d’organisateurs qui nourrissaient là, soirée après soirée, leur expertise.
La fin du dock me peine mais cette tristesse n’est rien comparé à celle provoquée par la désintégration des idéaux qui ont fait la jeunesse du boomer que je suis à l’insu de mon plein gré — un peu comme ma nationalité d’ailleurs. Dans un cas comme dans l’autre, je n’y suis pour rien — et ont construit l’humain que j’ai choisi de devenir. Du bout du bout de mes orteils jusqu’à la pointe ultime de mes cheveux, résonne un « plus jamais ça » qui pour moi, comme pour nombre de personnes qui ont été d’une manière ou d’une autre, confrontées de prés ou de très loin au nazisme, au racisme, est une colonne vertébrale. « Plus jamais ça » !
Aujourd’hui, j’ai le sentiment qu’on frappe à coup de barres de fer cette colonne vertébrale, à chaque tirade récriminatoire, à chaque sentence discriminatoire à l’encontre de nos concitoyens, concitoyennes né.es de l’autre côté de la Grande Bleue ou de leurs enfants souvent nés sur le sol de France. L’Autre, l’Etranger, le Pas Pareil est à nouveau le bouc émissaire de nos maux et pas qu’à demi-mot.
le 6 février dernier, Bruno Retailleau, pour ne citer que le Ministre de l’Intérieur d’un gouvernement nommé par un Premier Ministre issu d’un parti minoritaire à l’Assemblée, mais faisant parti de la majorité qui s’est opposée au rassemblement national, avec l’aval d’un président élu pour faire barrage aux idées des extrêmes-droites, pouvait déclarer sur LCI, concernant son projet de modifications des conditions d’accès à la nationalité française dans le département de Mayotte : « Vous avez un exemple incroyable d'une société, sur un petit territoire, d'une société totalement déséquilibrée par les flux migratoires. Or, ce sont des musulmans, ils sont noirs, c'est simplement qu’aucune société, quelle que soit la culture, ne peut supporter une proportion où il y a, comme le disait le Premier ministre, une submersion.». Ça suffit ! « Plus jamais ça » avait-on dit. Quand jours après jours, les digues lâchent. Quand sur nos écrans ou au café du coin, les barrages craquent, n’oublions pas que chaque atteinte à une personne en fonction de sa pigmentation de peau, de son faciès, de ses origines ou de ses pratiques cultuelles, sexuelles… est une atteinte à l’ensemble de notre corps social et qu’à ce titre, elle doit être sévèrement punie. "Plus jamais ça ! », partout, tout le temps et pour tout le monde.
AVRIL 2025



























































